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Le groupe DREAM -> Les travaux de recherche

Les travaux de recherche

 

L'équipe DREAM a travaillé depuis son origine dans une perspective de recherche collaborative, alliant des expérimentations dans les classes, la création de ressources pour les enseignants et les formateurs et des recherches qui ont conduit à trois Master de recherche et deux thèses (Aldon, 2008, Front, 2010, 2015, Gardes, 2009, 2013)  (Voir Bibliographie). Dans cette page, nous présentons les cadres théoriques et la méthodologie qui sont les fondements des recherches collaboratives conduites dans le cadre de cette équipe et les questions qui se sont posées et qui se posent encore aujourd'hui.

Les cadres théoriques

La théorie des situations didactiques

La théorie des situations didactiques (Brousseau, 1986) est le cadre fondamental sur lequel les recherches se sont appuyées. La théorie des situations didactiques (TSD) s'inscrit dans une hypothèse piagétienne de la construction des connaissances ; les théories fondamentales de l'adaptation à l'environnement de la psychologie génétique de Piaget ont été largement reprises par Brousseau pour modéliser les situations d'enseignement ; dans cette modélisation une situation est didactique parce qu'elle va s'intéresser fondamentalement à un savoir en jeu.

"En réalité le jeu du maître et de l'élève, dès lors qu'il est spécifique du savoir, ne peut être défini a priori, puisque l'élève ne peut en connaître que les règles non spécifiques lorsqu'il entreprend un nouvel apprentissage. Le jeu s'établit, change, se rompt et se renoue au fur à mesure des acquisitions, de l'évolution des deux protagonistes et de l'histoire qu'ils produisent." (Brousseau, 2011)

Le contrat didactique

La partie de la relation contractuelle qui concerne le savoir est le contrat didactique. Le contrat didactique comporte donc par essence une partie implicite, celle qui concerne directement le savoir visé : si le maître dit ce qu'il veut, il ne peut plus l'obtenir. L'exemple type d'un contrat didactique a été étudié dans le problème de l'âge du capitaine (Stella Baruk) où la question posée aux enfants était : sur un bateau, il y a 26 moutons et 10 chèvres. Quel est l'âge du capitaine ? L'expérience initiale, confortée par de nombreuses autres expériences, montre que la réponse la plus fréquemment donnée et 36 ans. On peut penser que cette réponse est absurde puisque la question posée ne peut avoir de réponse avec les données fournies, mais on peut aussi l'analyser en terme de contrat didactique : si le maître pose cette question, c'est qu'il attend une réponse ; l'élève cherche alors à donner non pas la réponse à la question posée, mais la réponse que le maître devrait attendre ; il reste alors à utiliser ses connaissances et les données ; multiplier les deux nombres donne une réponse qui ne peut correspondre à un âge, diviser ou soustraire donne un résultat trop petit pour être l'âge d'un capitaine, il reste donc la seule "solution" possible qui est d'additionner les nombres proposés. La réponse est cohérente si le contrat didactique, c'est à dire le contrat portant sur le savoir, est établi de telle sorte que le maître pose des questions auxquelles les élèves peuvent répondre. La "négociation" du contrat didactique n'est pas explicite, contrairement à un contrat pédagogique. Cette négociation passe par le phénomène de dévolution dans lequel le problème posé par le maître devient et reste dans le temps le problème que l'élève veut résoudre. Il y a un transfert de responsabilité dans la résolution et en conséquence dans la construction des connaissances.

Le milieu dans une situation adidactique

Dans une situation didactique, l'élève va être confronté à un "milieu", c'est à dire l'environnement proposé par le professeur augmenté de toutes ses connaissances. Le professeur construit une situation de telle façon que l'élève confronté aux rétroactions de ce milieu va réorganiser ses connaissances pour en faire émerger de nouvelles qui seront alors institutionnalisées dans la classe. Le milieu est ainsi tout ce qui agit sur l'élève et ce sur quoi agit l'élève : "le MILIEU est le système antagoniste du système enseigné, ou plutôt, précédemment enseigné" (Brousseau, 1986, page 340).
L'élève agit dans un but qui n'est pas l'apprentissage, il agit pour résoudre le problème posé, c'est la situation d'action. Dans cette situation d'action l'élève élabore des stratégies par dialogue avec le milieu, sa représentation du problème évolue, c'est la dialectique de l'action. La résolution d'un problème devient pour l'élève le seul enjeu de la situation, il y a donc un glissement dans le jeu maître - élève, puisque le maître a une intention didactique et que l'élève n'en a pas : c'est la situation adidactique.

La dévolution est alors "le processus par lequel l'enseignant parvient dans une situation didactique à placer l'élève comme simple actant dans une situation a-didactique (à modèle non didactique). Il cherche par là à ce que l'action de l'élève ne soit produite et justifiée que par les nécessités du milieu et par ses connaissances, et non par l'interprétation des procédés didactiques du professeur. La dévolution consiste pour l'enseignant, non seulement, à proposer à l'élève une situation qui doit susciter chez lui une activité non convenue, mais aussi à faire en sorte qu'il se sente responsable de l'obtention du résultat proposé, et qu'il accepte l'idée que la solution ne dépend que de l'exercice des connaissances qu'il possède déjà." (Brousseau, 2010)

Symétriquement à la dévolution, le phénomène d'institutionnalisation permet à "l'institution" classe de donner un statut "officiel", institutionnel aux connaissances qui ont été utilisées dans la résolution. Il s'agit de transformer ces connaissances en un savoir partagé : "[L'institutionnalisation] C'est elle qui permet au professeur et à l'élève de reconnaître et de légitimer "l'objet de l'enseignement", même s'ils le voient de façons différentes. Elle peut consister en la reconnaissance par l'enseignant de la valeur d'une production des élèves." (Brousseau, 2010) 

 Cette théorie s'oppose à la maïeutique de Socrate dans laquelle la responsabilité du savoir est confiée au maître. Dans la TSD, c'est au contraire l'élève qui prend la responsabilité de son apprentissage. Ce qui de fait implique la nécessité qu'il accepte cette responsabilité.

En résumé

  • Le professeur doit faire apprendre un savoir,
  • Il propose une situation dans laquelle ce savoir est en jeu, (Brousseau parle de situation fondamentale directement liée à ce savoir)
  • L'élève qui accepte de jouer ce jeu se trouve confronté au milieu proposé par le professeur (situation adidactique)
  • Entre le maître et l'élève il y a une relation contractuelle à propos du savoir : c'est ce qu'on nomme le contrat didactique.
  • Les interactions entre le milieu et l'élève construise la connaissance (situation d'action)
  • L'élève rend compte de cette connaissance construite (situation de formulation)
  • Le professeur institutionnalise la connaissance en savoir. (institutionnalisation)

Les situations didactiques de recherche de problèmes

La dimension expérimentale des mathématiques

La notion d'expérience peut être regardée à la fois dans le domaine de la philosophie des sciences et dans celui de la philosophie de la connaissance. La subjectivité de l'expérience a été largement mise en évidence dans l'histoire des sciences et l'immédiateté des perceptions sensibles ne peut impliquer un caractère scientifique aux résultats de l'expérience.

L'empirisme classique conduit au scepticisme (Hume, 1946) parce que la justification objective d'un fait par l'expérience ne peut être déduite d'une expérience subjective. Sans vouloir entrer dans une description exhaustive du rôle de l'expérience dans les sciences, les liens entre la théorie et l'expérience ont toujours amené à considérer les relations entre le domaine sensible et sa formalisation théorique dans un langage particulier. Toute expérience est directement reliée à la théorie (aux hypothèses) sous-jacentes ; Kuhn (1962) soutient que chaque théorie porte en elle les interprétations des termes qu'elle emploie si bien qu'une même expérience et ses résultats pourront conduire à des interprétations différentes suivant les hypothèses théoriques sous-jacentes.

L'observation, la manipulation en mettant en relation l'action (la relation au sensible) et la réflexion (la relation au théorique) constituent un fondement de l'expérience qu'il s'agit de transposer d'une part vers les mathématiques et d'autre part vers l'enseignement. Une première question qui peut se poser est la nature des objets qu'une expérience mathématique peut mettre en jeu. Le sensible en mathématiques peut être vu à travers les objets concrets manipulés (figure, objets matériels, artefacts tangibles,...) ou à travers les objets mathématiques naturalisés, c'est à dire suffisamment familiers pour pouvoir être considérés comme « concrets » :

« Le concret c'est l'abstrait rendu familier par l'usage » (Langevin, 1950)

Ainsi les objets mathématiques objets des expériences peuvent être dialectiquement perçus d'un point de vue sensible par la manipulation directe de certaines de leurs représentations et d'un point de vue théorique par leurs mises en relation dans des structures abstraites à travers des systèmes de signes. Manipuler des objets mathématiques revient donc à s'approprier des systèmes de signes pour rendre les objets familiers, maîtrisables dans leurs relations aux théories sous-jacentes.

La rupture épistémologique entre la perception sensible de l'objet et la manipulation effective passe par la référence à la théorie dans une construction dialectique de l'objet et de la théorie. Ces quelques considérations amènent à considérer l'expérience en mathématiques comme une synthèse des manipulations sur les représentations des objets mathématiques et des élaborations théoriques à travers des systèmes de signes.

Des situations didactiques aux Situations Didactiques de Recherche de Problèmes

Construire un enseignement sur des problèmes conduit à s'intéresser plus précisément au type de situation introduite dans la classe, à leur gestion par les enseignants et aux évaluations des connaissances acquises. Les situations didactiques de recherche de problèmes sont des situations au sens de Brousseau, mais ce sont des situations qui ne ne sont pas construites pour viser une connaissance précise et en ce sens se démarquent des situations fondamentales de la TSD. Le problème mathématique au cœur de la situation est l’essence de la situation. Elles sont donc aussi reliées au courant du « problem solving » en ce sens que l'enrôlement des élèves les amènent à découvrir une petite partie des mathématiques mais s'en démarquent parce que au-delà des compétences meta-mathématiques et des heuristiques visées, de l'acquisition de connaissances mathématiques repérées constituent un objectif d'enseignement. Il s'agit donc, à travers des expériences sur les objets en jeu d'affermir les connaissances de ces objets ou d'en explorer de nouveaux nécessaires à la résolution du problème. La dimension expérimentale, telle que décrite précédemment, est une composante essentielle des SDRP en ce sens que les liens entre les objets mathématiques en jeu se construisent dans la mise en œuvre d'expériences qui peuvent utiliser des artefacts concrets ou des objets mathématiques naturalisés ou en cours d'acquisition. (Voir)

Les questions de recherche

 Les questions suivantes font désormais parties du développement de la recherche.

  • Quelles sont les connaissances, les compétences transversales et méta-mathématiques qu'il est possible d'évaluer dans une pratique de recherche de problème ? Et quels sont les indicateurs qu'il est possible de mettre en place ?
  • La créativité et l'invention mathématique développées dans les problèmes de recherche modifient elles l'image des mathématiques chez les élèves (et leur envie de faire des mathématiques). Et chez les professeurs ?
  • Les problèmes de recherche qui développent une forme d'acquisition des savoirs font ils progresser les élèves dans les autres domaines de l'activité mathématique ? Comment les élèves réinvestissent-ils dans d'autres cadres les compétences et les connaissances développées ?

Pour tenter de répondre à ces questions, le groupe réfléchit à un enseignement fondé sur les problèmes qui accorderait un place importante aux problèmes de recherche en mathématiques et à leur dimension expérimentale. Leur intégration dans une progression annuelle et une progression de cycle est également au cœur de notre réflexion.

La méthodologie

La méthodologie de recherche s'appuie sur le paradigme de recherche orientée par la conception (Design Based Research dans le monde anglo-saxon) pour lequel la recherche est fondée sur une nécessité épistémologique pour les chercheurs d’agir avec les enseignants (Sanchez et Monod-Ansaldi, 2015, Monod-Ansaldi & al., 2019, Nizet & al., 2019). Ces recherches articulent des visées pragmatiques et heuristiques en développant une méthodologie fondée sur des cycles de réflexion, construction, expérimentations, analyses et adaptation. L'idée de cycle est fondée sur une expérience de conception : une phase d'hypothèse, une phase de conception, une phase d'expérimentation et une phase de retour d'expérience qui conduit à un affinement de l'hypothèse et un second cycle de conception, expérimentation et analyse.

Swan (2014) ajoute à cette description les quatre caractéristiques :

  •  créatif et visionnaire : la recherche est fondée sur une idée d'innovation. Une condition nécessaire est donc d'avoir à la fois un résultat tangible intéressant pour la classe et une recherche féconde : "The researcher identifies a problem in a defined context and, drawing on prior research, envisions a tool that might help end users to tackle it." (Swan, 2014)
  • écologiquement valable : l'objet d'éducation construit est acceptable dans l'institution scolaire visée. 
  • interventionniste et itérative : chaque acteur peut apporter et recevoir dans toutes les phases de la recherche. Le rôle des acteurs peut évoluer au cours des itérations et la conception est le résultat des phases de conceptualisation, d'analyse et d'observation tout autant que des idées conceptuelles et pragmatiques.
  • fondé sur la théorie : les réflexions s'appuient sur un cadre théorique solide.

 

 

Brousseau (1986). Théorisation des phénomènes d'enseignement des mathématiques, Thèse d'état de l'Université de Bordeaux

Brousseau, G. (2011). Éléments pour une ingénierie didactique, En ligne

Hume, D. (1946).Treatise of human nature, Selby-Bigge, Clarendon-Press Oxford

Kuhn, T. (1962). The structure of scientific revolutions, Chicago University Press

Langevin, P. (1950). La pensée et l'action, textes recueillis par Paul Labérenne, préfaces de Frédéric Joliot-Curie et Georges Cogniot, Paris, Les Éditeurs Français Réunis

Monod-Ansaldi, R., Aldon, G., Vincent, C. (2019). Objets frontières et brokering dans les négociations en recherche orientée par la conception, Education & didactique, 13.2

Nizet, I., Monod-Ansaldi, R., Aldon, G. Prieur, M. & Criquet, A. (2019). L’analyse de valuations dans une démarche collaborative de recherche. La Revue LEeE, 1. https://revue.leee.online/index.php/info/article/view/47

Sanchez, E. & Monod-Ansaldi, R. (2015). Recherche collaborative orientée par la conception. Un paradigme méthodologique pour prendre en compte la complexité des situations d’enseignement-apprentissage. Education & Didactique, 9(2), 73-94.

Swan, M. (2014). Design Based Research, Encyclopedia of Mathematics Education, Springer Science+Business Media, Dordrecht.